Dons au musée d'Orléans

Fondation La Marck

En 2022, deux dons ont été faits au musée des Beaux-Arts d'Orléans.

 

Noël Hallé (1711-1781), Une Savoyarde et son enfant

 

Dans la vente Artcurial du 9 novembre 2022 où la fondation avait acheté deux lots pour le Louvre, il y avait aussi un tableau de Noël Hallé (1711-1781), membre de l’Académie royale de peinture et un temps directeur de l’Académie de France à Rome. Il s’était spécialisé dans les sujets mythologiques et religieux, mais ne dédaignait pas de brosser des scènes du peuple. C’est le cas de ce portrait d’une Savoyarde (c’est le titre de l’œuvre), représentée tenant sur ses genoux son bébé dans un berceau en bois. Les Savoyards étaient alors nombreux à Paris où ils occupaient des petits métiers, pas seulement celui de ramoneur ! Hallé avait déjà auparavant utilisé ce thème dans un tableau intitulé Une Savoyarde et ses deux enfants, mais selon la spécialiste du peintre, Nicole Willk-Brocard, il s’agirait en fait ici de l’épouse du peintre, Geneviève Lorry, et de leur fils Jean-Noël, futur médecin célèbre, né en 1755. La toile est signée et datée 1756. Son succès a incité Noël Hallé à en peindre une réplique l’année suivante avec une présentation un peu moins dépouillée : présence d’un chien sur le côté et d’un drap en arrière-plan ; mais la main ouverte au lieu de tenir le berceau et la présence de ce qui ressemble à une sébile à ses pieds donnent à cette deuxième version une signification bien différente, ce qui fait douter qu’il puisse s’agir de la femme du peintre. On ne sait laquelle des deux a figuré au salon de 1757.

 
Ce n’était pas la première fois qu’Artcurial proposait ce tableau et son estimation avait entre-temps été baissée substantiellement, de sorte que nous avons pu l’acheter à un prix très attractif. Curieusement, le musée d’Orléans avait aussi repéré l’œuvre et cherchait un mécène, de sorte que notre proposition a été bien reçue. La direction du musée voulait étoffer sa présentation de scènes de genre du XVIIIe autant que d’œuvres de Hallé autres que ses grands sujets religieux.

 

 

Palma le Jeune (c1548-1628), La Naissance de la Vierge

 

Le conservateur du musée des Beaux-Arts nous a appelés à l’aide en février 2022 sur suggestion du département des Peintures du Louvre pour un très grand tableau (3m 19 de haut) de Palma le Jeune (c1548-1628), La Naissance de la Vierge, une composition au dessin raffiné et élégant où sainte Anne est entourée de dix personnages sans compter les angelots. On reconnaît derrière elle son époux saint Joachim.

 

Palma le Jeune (Palma il Giovane), petit-neveu de Palma le Vieux, est né et mort à Venise, et y a fait toute sa carrière. Il a d’abord subi la forte influence du Titien avant d’élaborer son style propre qui s’inscrit dans le courant maniériste. Il a reçu de nombreuses commandes d’églises de Venise et de la région, d’où l’importance de la peinture religieuse dans son œuvre. Il a aussi participé à de grands chantiers publics, au Palais des Doges notamment. Il y a travaillé aux côtés de ses aînés Véronèse et Tintoret ; comme son style est proche de celui de ce dernier, il est quelquefois difficile de l’en distinguer.

 

Les grands formats (plus de 2m 50 de haut) réalisés par lui sont rares à l’étranger. Outre celui d’Orléans, on en compte six : deux à l’Ermitage, un au musée Magnin (Dijon), au musée Fabre (Montpellier), au MBA de Lyon et au MFA de Boston. La notice de ce dernier explique bien le processus par lequel sont passées les églises pour se séparer de leurs tableaux : elles ont été fermées et déconsacrées, puis les collections dispersées. Il y a eu aussi des saisies révolutionnaires (le tableau du musée Fabre).

 

Les deux spécialistes de l’artiste, Stefania Mason et Maria Aresin, ont authentifié sans hésitation le tableau, dont la qualité tranche avec celle des très nombreuses œuvres généreusement attribuées à Palma le Jeune par les experts internationaux. Outre le dessin, la touche révèle toute la brillance et la souplesse du pinceau de l’artiste. D’après elles, il pourrait provenir de l’église Sant’Apollinare, un lieu de culte vénitien fermé au début du XIXe siècle, puis déconsacré. En effet, leur recensement des œuvres de Palma le Jeune sur le thème de la naissance de la Vierge mentionne au moins cinq tableaux, trois toujours en place dans des églises de Vénétie, un dans un musée américain à Greenville (Caroline du Sud) et le nôtre, dont on sait qu’il a été anciennement dans des collections hongroises, sans doute au temps de la Venise autrichienne. Reste à déterminer si c’est notre tableau ou celui de Greenville qui vient de l’église Sant’Apollinare.

 

© Musée d'Orléans / Thierry Ollivier

             

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